Depuis le 29 juin 2015, l’école publique de Beaumont-la-Ronce (Indre-et-Loire) porte le nom de « Georges Biéret », père de notre trésorière Hélène Biéret. Voici le texte qu’elle a lu à l’occasion de la pose de la plaque commémorative et de la dénomination de l’école.
Georges Biéret nait à Tours, le 03 avril 1908 dans une famille ouvrière. Son père, Jean, est ajusteur et sa mère, Marie, couturière. Il fréquente l’école primaire publique de son quartier puis suit le cours complémentaire Paul-Louis Courrier.
A 16 ans, il obtient le brevet élémentaire et est reçu au concours d’entrée à l’Ecole Normale de garçons d’Indre-et-Loire de Loches. En 1927, il obtient le brevet supérieur et reçoit le 1er prix du Concours général national en Géographie. Au mois d’octobre suivant, il est nommé instituteur à Beaumont-la-Ronce. L’école des filles échoit à Odette Bouchard qui débute également dans la profession ; ils se marient en août 1928. En octobre 1930, ils obtiennent un poste double à Tauxigny, petit village près de Loches.
Georges en assure la direction jusqu’à son arrestation en 1942. À Beaumont-la-Ronce, il était chargé des cours préparatoire et élémentaire, à Tauxigny, il prépare les enfants à l’entrée en 6ème, au certificat d’études et assure des cours du soir. Il assume aussi, comme la plupart des instituteurs de l’époque, la charge de secrétaire de mairie et anime la vie culturelle de la commune. Il introduit le cinéma à l’école, crée une classe de solfège, organise les fêtes du village. Il aimait la vie sous toutes ses formes, ayant toujours une histoire à raconter, avec entrain et bonne humeur.
À l’Ecole normale, il avait adhéré au Parti communise et au Syndicat national des instituteursoù il militera toujours activement. Ses collègues parlent de lui comme « d’un éducateur enthousiaste, ouvert à toutes les idées nouvelles, se plaisant à innover et expérimenter, aimant les enfants et étant aimé d’eux ». Son intérêt pour la vie paysanne le conduit à soutenir l’installation d’une coopérative d’échange blé-pain ; il est toujours disponible pour conseiller, guider, aider discrètement.
Et vient la guerre.
Dès juillet 1940, il est à l’initiative de l’un des premiers tracts des instituteurs résistants de Touraine appelant à lutter contre l’occupant. Bien qu’il soit malade depuis 1939, il résiste selon ses forces. Il rassemble autour de lui plusieurs paysans décidés. Ils cachent des prisonniers évadés, des proscrits, leur permettent de passer la ligne de démarcation. Georges recevait des tracts et les transmettait. Il créa et organisa le maquis de Tauxigny qui se développera après sa mort.
Le 25 mars 1942, un commissaire de la police française, assisté de 2 policiers de la Brigade spéciale d’Orléans et de 2 policiers allemands, viennent perquisitionner à la maison. Ils ne trouvent rien mais emmènent mon père « pour complément d’information » ; lui, prend soin de dire à son petit garçon bouleversé : « Ne t’inquiète pas, je vais revenir demain »…
Nous ne devions jamais le revoir.
Il fut d’abord interrogé à la prison de Tours, 53 heures, enchaîné sur une chaise. Mais dans ce corps malade, il y avait une volonté de fer. Pas une indication, pas un nom de ses camarades de réseau ne lui échappa. Il ne put être inculpé que d’avoir aidé des gens à passer la ligne de démarcation.
Transféré à Paris et livré à la police allemande, il reste 5 mois en cellule, seul, nourri d’un litre de soupe par jour, à la prison du Cherche-Midi. Fin août 1942, il est conduit au fort militaire de Romainville, réserve d’otages pour l’armée allemande. Le soir du 20 septembre, on lui annonce qu’il sera fusillé le lendemain en représailles d’un attentat dans un cinéma de Paris. 46 otages partent pour le Mont-Valérien, le 21 septembre 1942.
Georges Biéret tombe à 9h30 dans la Clairière des fusillés .
En 1945, sa femme écrit à son inspecteur des écoles : « Les nazis allemands et français ne se sont pas trompés, Georges Biéret aimait la France et a lutté pour elle, pour son meilleur et plus juste destin, de toutes ses forces et de tout son courage. Il a accompli jusqu’au bout, et sans faiblir, malgré sa santé fragile, ce qu’il considérait comme son devoir de communiste et de Français. Il a toujours placé son idéal au-dessus de ses intérêts et de ses plus légitimes affections ».
Je remercie Monsieur le Maire et le conseil de Beaumont-la-Ronce d’avoir voulu honorer sa mémoire en donnant son nom au groupe scolaire de la commune.
Hélène Biéret