Fusillés de La Maltière (2013)

Le 30 décembre 2013, par un temps pluvieux, a été commémorée la Fusillade de La Maltière : 25 hommes passés par les armes au cours de la matinée du 30 décembre 1942. La cérémonie, était présidée par Monsieur Patrick Strzoda, préfet de la région Bretagne et d’Ille-et- Vilaine. Une importante délégation de porte-drapeaux et de nombreuses personnalités civiles et militaires y assistaient, dont Monsieur le Consul des Etats-Unis d’Amérique en poste à Rennes. Des élèves de l’école rennaise Oscar Leroux avaient reçu la mission de déposer des roses devant la butte.
Cet hommage a été ouvert par Fernand Etiemble, adjoint au maire de Saint-Jacques- de-la- Lande donnant lecture de la lettre d’adieu d’un des fusillés, Louis Moreaux, lettre poignante d’un patriote de quarante ans, écrite à quelques instants de donner sa vie pour la France. Ceux qui sont morts ici étaient des hommes de conviction. Leur engagement dans la Résistance était réfléchi. Ils avaient accepté le sacrifice suprême.
Les lycéens et étudiants présents procédèrent à l’appel de tous ceux qui tombèrent sous les balles de l’Occupant à la Maltière. Huit des vingt-cinq fusillés de ce jour-là avaient moins de 25 ans.
De nombreuses gerbes furent déposées, celles des autorités locales ainsi que celles de la FDIRP et ANACR d’Ille-et- Vilaine, du Parti Communiste (car bon nombre des fusillés partageaient cet engagement politique) et des Familles de fusillés. J’ai eu l’honneur de déposer celle de notre association. Et retentirent La Marseillaise et le Chant des Partisans.
Le piquet d’honneur était établi par des Marsouins du 11ème RAMa (régiment d’artillerie de marine) basé au camp de La-Lande-d’Ouée, à Saint-Aubin-du-Cormier (Ille-et- Vilaine). Le général de corps d’armée, Vincent Lafontaine, leur adressa un salut particulier, certains soldats du régiment sécurisant alors l’aéroport de Bamako, au Mali.
De son côté, s’adressant aux enfants, Monsieur le Préfet déclara : «… Je suis heureux de vous voir ici. Votre présence est importante parce que c’est à vous qu’il reviendra, plus tard, de rappeler le souvenir de ce qui s’est passé en ces lieux ».
Ce passé, douloureux pour beaucoup, est celui des familles de fusillés. C’est avec inquiétude qu’on assiste à certaines renaissances néo-nazies. Ainsi en Grèce, avec le succès électoral du parti « Aube Dorée » : 18 députés sur 300 au Parlement d’Athènes en juin 2012 ! Ainsi en Hongrie, avec « l’Aube Hongroise » qui prône la pureté ethnique et devient, en 2010, la troisième force politique du pays : 48 députés ! Chez nous, les signes d’inquiétude se multiplient, du Front National au sinistre comique Dieudonné dont l’écoute par des milliers de gens ne doit pas être sous estimée ! On ne peut s’empêcher de mal vivre l’importance accordée par les médias à ces mouvances d’extrême droite au détriment des forces politiques et syndicales héritières de celles et ceux dont fut honorée la mémoire en ce lundi matin 30 décembre 2013.
François René Doublet


Mémorial de la Butte de La Maltière, Ille-et-vilaine (2012)

L’un de nos adhérents nous a communiqué un dossier d’où nous avons tiré les informations suivantes.
Non loin de Rennes, à Saint-Jacques-de-la-Lande, hommage est rendu chaque année, aux 108 Fusillés connus qui furent abattus à la butte de tir du camp de La Maltière. La fusillade ayant le plus bouleversé les consciences fut celle du 30 décembre 1942, qui coûta la vie à 25 Résistants, âgés de 19 à 43 ans. En décembre dernier, le jour même de l’anniversaire du drame, en présence de Michel Cadot, préfet de région, s’est déroulée la soixante-neuvième commémoration de ce massacre. Doyen des porte-drapeaux ce jour-là, Francis Gabory a connu le « Camp 225 » de Rawa-Ruska en Ukraine, sinistre lieu d’internement où les nazis regroupaient les militaires repris après s’être évadés d’un stalag.
Renée Thouanel, présidente départementale de l’ADIRP et secrétaire de l’ANACR, a retracé l’historique du Mémorial de la Butte de La Maltière. Elle a évoqué l’occupation militaire continue du site, du XVIème siècle jusqu’à l’installation d’un stand de tir en 1937 et l’utilisation du camp par les Français et les Anglais avant que les nazis ne s’y installent et y fusillent, dès 1940. Ainsi, le 17 juillet de cette année-là, Marcel Brossier est passé par les armes pour avoir sectionné un câble téléphonique. Beaucoup d’autres martyrs y connaîtront le même sort.
Mme Thouanel rapporte le récit de Jean Pont, habitant de St-Jacques-de-la-Lande (qui devint maire de la commune à la Libération) : « Le matin du 30 décembre 1942, j’ai vu passer sous mes fenêtres le cortège des patriotes allant à la mort. Ils étaient parqués dans des voitures cellulaires, encadrés par des motards de la gendarmerie allemande. Les pauvres futurs suppliciés chantaient à tue-tête des chants patriotiques.
« Arrivés sur place, ils furent liés à trois poteaux et fusillés toutes les cinq minutes. Le jeune Fourrier, âgé de 18 ans, demanda à être fusillé le dernier et, pendant toute la durée du carnage, soutint le moral de ses camarades, crachant au visage de ses bourreaux sa haine et son mépris.
« Les corps furent transportés au cimetière de Saint-Jacques. Les Allemands avaient réquisitionné des prisonniers français de race noire (Malgaches, Sénégalais…) ; ils leur donnèrent l’ordre de mettre les corps à même la terre après avoir creusé des fosses . Les prisonniers refusèrent disant qu’ils n’acceptaient pas que des humains soient enterrés comme des chiens. Les Allemands menacèrent de les tuer sur place et de les jeter dans ces fosses. Ils maintinrent leur refus, ce que voyant, les Allemands acceptèrent de leur faire une sépulture décente en fabriquant des cercueils… »
Avant d’être conduits à la Butte de la Maltière, les sacrifiés séjournaient à la prison départementale Jacques Cartier de Rennes. Aujourd’hui, dans le cadre de la rénovation du parc immobilier des prisons françaises, un nouvel établissement carcéral a été construit dans une commune voisine. Ainsi, les lieux chargés d’Histoire de l’ancienne maison d’arrêt font l’objet d’une réflexion sur le devenir du site. Quel que soit le projet de rénovation adopté, il est souhaitable que les traces des souffrances endurées en ces lieux au cours des années d’Occupation ne disparaissent pas, mais, bien au contraire, soient publiquement et respectueusement mises en lumière.
François-René Doublet