Rouillé-Vaugeton (Vienne), juin 2015

Chaque année, les municipalités rurales de Celle-L’Evescault, Lusignan, Rouillé et Saint-Sauvant organisent conjointement plusieurs rassemblements, un même week-end, afin de rappeler de hauts faits de Résistance dont la Libération du Camp de Rouillé et le Massacre de Vaugeton. Nous publions à cette occasion deux allocutions prononcées le 28 juin dernier, la première par Madame Carine Picard-Nilès, présidente de l’Amicale Châteaubriant-Voves-Rouillé-Aincourt, la seconde par Monsieur Philippe Lincio, professeur d’Histoire au collège de Lusignan.

Discours de Mme Carine Picard-Nilès, à Rouillé :

« …70 ans après la capitulation sans condition de l’Allemagne, 70 ans après la libération des camps, le message de fraternité et d’espoir que nous ont légué ceux de la Résistance, morts pour la France doit rester vivant en chacun de nous.
Le 24 juin 1940, les troupes hitlériennes entraient dans Poitiers et le 6 septembre 1941, un centre d’internement administratif appelé plus joliment « Centre de séjour surveillé » ouvrait à Rouillé. Conçu pour recevoir 150 prisonniers, il en hébergera jusqu’à 638 en novembre 1942. Beaucoup ne retrouveront pas la liberté et seront soit fusillés à la butte de Biard, soit dirigés vers les camps de la mort en Allemagne. Il faut souligner que les habitants de Rouillé ont très largement contribué, au péril de leur vie, à soutenir et à aider les prisonniers.
De 1940 à 1944, la Résistance dans la Vienne a été très active dans ce département coupé en deux par la ligne de démarcation. Des premiers groupes de « l’Organisation Spéciale » aux « Francs-Tireurs et Partisans » en passant par le « Front National de Libération de la France », ce sont des centaines de patriotes qui se sont engagés en Résistance.
Je pense à tous ces internés qui se sont retrouvés ici, dans ce camp, dont il ressort que le but essentiel était de réduire toutes les volontés et tous les mouvements agissant contre le gouvernement de Vichy et les forces d’occupation nazie.
Je pense à tous ceux qui sont tombés les armes à la main ou devant un peloton d’exécution nazi, dont leur seul crime était de dire non à l’oppression. Ils ont donné, qui leur jeunesse, qui leur vie, pour que nous vivions libres.
Leur sacrifice ne doit pas être couvert du voile de l’oubli, la bête immonde veille partout dans le monde. Les thèses révisionnistes, négationnistes, le racisme, l’antisémitisme, l’anticommunisme se développent partout.
Aujourd’hui encore, les forces du mal relèvent la tête. Est-il acceptable 70 ans après la Libération de voir les émules des nazis s’emparer des médias et de la politique ici et dans le monde entier ?

Rappelons-nous simplement qu’Hitler en 1933 est arrivé au pouvoir par les urnes en Allemagne. Aujourd’hui, les mêmes attaques contre la Démocratie, les mêmes arguments racistes sont sans cesse diffusés dans les médias, comme des banalités. Le Front National se nourrit de la déliquescence des partis politiques de droite comme de gauche qui font une politique sociale et économique similaire qui affame les populations et les rend envieuses de leurs voisins.
« Celui qui ne connaît pas l’histoire est condamné à la revivre » disait Karl Marx en 1847.
Alors, oui, aujourd’hui, plus qu’encore, il y a nécessité à transmettre la mémoire de celles et ceux qui s’opposèrent au fascisme très tôt en 1940, simplement au début par la distribution de tracts, puis après dans la lutte armée. Il n’y a pas de petits actes de résistance, toute opposition était un acte de refus de la soumission à un régime totalitaire anti-démocratique.
Nous sommes ici réunis, pour montrer notre attachement au souvenir, notre volonté de ne plus revoir cela et encore plus, de faire connaître aux jeunes générations ce passé que l’on ne saurait méconnaître sans compromettre l’avenir. Fernand Devaux, ancien interné du camp qui fut déporté, se souvient je le cite : « A Rouillé, nous sommes accueillis par la population, de la gare au camp, venus nous témoigner sa sympathie. Vous savez, pour un résistant, pour un prisonnier interné, cela marque. Ce soutien ne s’est jamais arrêté y compris par les cheminots qui ouvraient le sifflet des locomotives chaque fois qu’ils passaient devant le camp. Pour nous, cela signifiait que des liens étaient possibles avec l’extérieur. Au fil des semaines s’ouvrent des cours de littérature, de philosophie, d’allemand. Des groupes de théâtre se créent, des compétitions sportives voient le jour. La solidarité est pour nous essentielle. Elle est une règle de vie dans le camp des internés politiques. Parler du camp, c’est aussi parler du docteur Cheminée, de Sœur Cherer, de Camille Lombard qui étaient les contacts directs avec nous. Des habitants nous procuraient de la nourriture, des renseignements. Les évasions des politiques étaient aidées par leur biais puis mises en liaison avec la résistance locale. »
Une partie des baraquements existe encore aujourd’hui et conjointement l’Association pour la Mémoire de la Résistance, de l’Internement et de la Déportation en Pays Mélusin, les élus locaux et l’amicale de Châteaubriant-Voves-Rouillé-Aincourt nous œuvrons afin que ce qui reste puisse devenir un musée, témoin de l’internement politique en France.
C’est le défi que nous relevons pour nos jeunes dans le respect des sensibilités, des convictions politiques, philosophiques ou religieuses de chacune et chacun. Nous sommes les porteurs de flambeau, celui de la vie, de la Résistance. D’ailleurs je tiens ici, à remercier tout particulièrement Jacqueline et Guy Dribault ainsi que l’équipe (dont Jean-Jacques Guerin) qui les entoure pour leur travail remarquable de transmission à la jeunesse et à la population de la Région.
Alors, aidez-nous à reprendre ce flambeau ensemble, « ami si tu tombes, un ami sort de l’ombre à ta place ». Il faut continuer à prôner les valeurs de la Résistance : la tolérance, le respect, la justice et la Paix.»

Discours de M. Philippe Lincio , à Vaugeton :

« …Au lendemain des joies de la Libération vint le temps du deuil, de l’absence de ceux qui étaient tombés et de ceux qui ne rentreraient plus. Camarades de combat, familles de victimes, témoins et élus furent les premiers artisans de la mémoire de la Résistance. Il fallait rendre une sépulture décente aux corps martyrisés, entretenir la flamme du souvenir sur les noms des disparus et perpétuer l’héritage de leurs actes. Pour conjurer l’oubli, la mémoire des résistants, déportés et internés s’inscrivit sur la pierre des stèles ou des croix, « selon qu’on croyait au ciel, selon qu’on n’y croyait pas ». Elle s’inscrivit aussi dans les cœurs, dans la chaleur des amicales et dans l’émotion des commémorations comme celles qui nous unissent ici chaque année.
Dans ces campagnes, les lieux de mémoire s’égrènent depuis 2002 au fil des « chemins de la liberté » tels les jalons d’une transmission à poursuivre. Aux portes des cimetières de Lusignan, de Celle l’Evescault et de Saint-Sauvant, des pupitres rappellent les noms des 31 résistants du Maquis Bernard assassinés en ces lieux. A la présidence de l’AMRID, Guy Dribault a beaucoup œuvré pour restituer identité et dignité à ceux dont les corps ont été abandonnés ici par les bourreaux hitlériens au terme de la terrible journée du 27 juin 1944. Grâce à ce patient et tenace travail de mémoire, ces noms, ces événements d’hier continuent d’interroger le promeneur d’aujourd’hui.
Chaque année, les rangs des témoins et des acteurs s’éclaircissent tandis que le temps des historiens s’affirme. Faire Histoire, c’est bien sûr confronter avec rigueur la parole du témoin aux archives ; cela conduit à questionner les motivations, les formes, les degrés, les temporalités de l’engagement résistant pour le comprendre dans toute son intensité. C’est aussi ouvrir de nouveaux champs en faisant du processus de construction de la mémoire lui-même un passionnant objet d’histoire. Alors, nos représentations sont analysées, enrichies de nuances mais aussi déconstruites, bousculées par l’irruption de nouveaux regards. Depuis 1945, l’historiographie du fait résistant est fertile de ces remises en cause qui ont suscité des débats stimulants souvent, dérangeants parfois car pas toujours dégagés des arrière-pensées de la société de leur époque. Dans ce mouvement continu, l’Histoire reste une science humaine qui se densifie désormais des apports de la sociologie, de l’ethnologie ou de la philosophie. L’exposition « Objets d’évasions » et le film Rouillé, un camp au Village, deux travaux initiés par l’ADEL, ont illustré cette volonté d’enraciner le fait historique dans un contexte local pour mieux explorer les mécanismes d’une mémoire qui fait désormais identité en Pays mélusin.
Enseigner la Résistance s’inspire de cette démarche exigeante qui ne se satisfait pas d’un récit mythifié, idéalisé, institutionnel. Depuis 1961, le Concours National de la Résistance et de la Déportation permet à la jeunesse de faire œuvre de mémoire tout en s’initiant aux exigences de la recherche historique. Par expérience, nous pouvons affirmer que les travaux les plus réussis ne sont pas forcément ceux qui font œuvre d’érudition ; ce sont plutôt ceux qui prouvent la faculté toujours renouvelée des élèves à nous surprendre, en s’appropriant notre enseignement pour le revivifier dans une créativité originale et actuelle.
Eux aussi méritent hommage aujourd’hui, car ils nous confortent tous ici dans la légitimité et la valeur de nos missions respectives ; aussi parce qu’ils démontrent la capacité de la jeunesse à s’emparer des interrogations posées par l’histoire, pour les inscrire au coeur des enjeux citoyens du monde d’aujourd’hui.
Nous voulons croire à ce beau passage de témoin…
L’an dernier, Fernand Devaux, ancien interné du camp de Rouillé et l’un des derniers survivants du convoi du 6 juillet 1942 pour Auschwitz,
nous rappelait à notre devoir de vigilance. L’intolérance, le racisme, l’antisémitisme, la xénophobie, l’homophobie n’ont pas sombré avec la libération des camps nazis. De nouveaux fanatismes masqués sous les oripeaux d’une religion dévoyée empruntent les autoroutes de la communication mondialisée pour porter la mort, l’angoisse et la division au cœur même de nos sociétés. Répondre à ces nouveaux obscurantismes exige de nos démocraties qu’elles ne se nient pas, en se refermant dans la peur et le soupçon mais qu’elles réaffirment leurs valeurs de liberté, d’égalité, de laïcité et de solidarité. C’est sans doute pour cela que Fernand nous appelait à préserver l’un des plus beaux legs de la Résistance aux générations de l’après-guerre : le Programme du Conseil National de la Résistance. De ce texte rédigé par une poignée d’hommes traqués au cœur d’un Paris encore occupé, découle ce socle qui régénéra les valeurs des Lumières et des révolutions françaises : la Sécurité sociale, le système de retraites par répartition, les services publics gratuits et accessibles à tous ; autant d’héritages et de références aujourd’hui menacés par les impératifs d’une économie libérale, avide et engoncée dans un présent sans avenir.
Je cite encore Fernand Devaux : « Au nom de qui, de quoi, devrions-nous aujourd’hui accepter une dictature économique qui asservit et appauvrit les peuples ? ».
Cette indignation intacte témoigne de la modernité du combat résistant face aux résignations et aux renoncements du présent.
En menant au Panthéon les belles figures de Geneviève Anthonioz-De Gaulle, de Pierre Brossolette, de Germaine Tillon, de Jean Zay, le Président de la République a évoqué « ce que la France a de meilleur ». Derrière les barbelés de Rouillé, devant les pelotons d’exécutions de Biard et de Vaugeton, il y eut aussi le meilleur de l’Europe : républicains espagnols, antifascistes italiens ou demandeurs d’asile tchécoslovaques, unis au-delà des nations, des croyances et des idéologies dans le refus du nazisme et de la collaboration. Aux côtés des étudiants allemands de la Rose Blanche décapités dans les prisons nazies, leur exemple reste la plus vivante réponse aux idéologies du repli d’aujourd’huiEnfin, pour conclure, il faudra toujours affirmer que le combat de la Résistance fut peut-être plus simplement un combat pour la reconquête d’une dignité bafouée, pour quelques bribes d’humanité arrachées à la barbarie du temps. C’est cette nécessité vitale, universelle et intemporelle que Jean Paulhan voulut ainsi exprimer dans la nuit de février 1944 : « Et je sais qu’il y en a qui disent : ils sont morts pour peu de chose. Un simple renseignement (pas toujours très précis) ne valait pas ça, ni un tract, ni même un journal clandestin (parfois assez mal composé). À ceux-là il faut répondre : « C’est qu’ils étaient du côté de la vie. C’est qu’ils aimaient des choses aussi insignifiantes qu’une chanson, un claquement des doigts, un sourire. Tu peux serrer dans ta main une abeille jusqu’à ce qu’elle étouffe. Elle n’étouffera pas sans t’avoir piqué. C’est peu de chose, dis-tu. Oui, c’est peu de chose. Mais si elle ne te piquait pas, il y a longtemps qu’il n’y aurait plus d’abeilles. »


Rouillé-Vaugeton (Vienne), 28 et 29 juin 2014

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Pour le soixante-dixième anniversaire de la libération du camp de Rouillé et du massacre de trente-et-un résistants en forêt de Saint-Sauvant, les municipalités de Lusignan, Celle l’Evescault et Rouillé (86), aux côtés de l’Amicale Châteaubriant-Voves-Rouillé-Aincourt et de l’Association pour la mémoire de la Résistance, de l’Internement et de la Déportation ont invité la population à se joindre aux autorités civiles et militaires pour une série de cérémonies.
Dans l’après-midi du samedi 28, hommages sont rendus à deux résistantes exemplaires : l’assistante sociale Sœur Cherer, devant la maison où elle s’était réfugiée, place de l’Hôtel de ville à Lusignan  ; puis Simone Fumoleau, sur sa tombe au cimetière de Rouillé. Par ailleurs, deux nouveaux pupitres commémoratifs du parcours Les Chemins de la Liberté sont dévoilés aux cimetières de Lusignan et de Celle.
Dimanche 29, la matinée est consacrée aux cérémonies devant les stèles de Rouillé puis de Vaugeton. Lecture du message de Mme Véronique Rochais-Cheminée, maire de Rouillé, est donnée avant l’intervention de Fernand Devaux dont nous citons un passage ci-dessous. Patrick Bouffard, maire de Celle l’Evescault et Lucien Philipponneau, ancien résistant du groupe Noël prennent la parole à Vaugeton. Un détachement de l’École nationale de sous-officiers d’active de Saint-Maixent rend les honneurs.
J.C.


Fernand Devaux

Arrêté à 18 ans le 5 octobre 1941 interné successivement à Aincourt, Rouillé puis Compiègne avant d’être déporté à Auschwitz le 6 mai 1942, le rescapé Fernand Devaux s’inquiète aujourd’hui de la résurgence des vieux démons qui ont miné le 20e siècle : racisme, xénophobie, homophobie antisémitisme. Il nous rappelle aussi que « l’Extrème Droite n’a pas changé, elle masque son histoire, ses racines, ses objectifs. (…) Comment ne pas penser à tous ces résistants internés, fusillés, déportés qui avaient proclamé
« Plus jamais ça ». Personnellement, je pense à mes camarades de Rouillé, d’Aincourt, de Voves, de Châteaubriant, d’Auschwitz.
Deux-cent-dix-neuf internés de Rouillé sont transférés à Compiègne au printemps 1942. Cent-cinquante-et-un seront déportés le 6 juillet 1942 à Auschwitz, quatorze survivront.
Je pense aussi aux fusillés du camp de Rouillé abattus avant notre départ pour Compiègne : le 7 mars 1942, trois jeunes venant du camp d’Aincourt (Huart, Jurquet et Martin) ; le 30 avril 1942  : Bréant, Dejardin, Grimbaum, Pentier, Vedzland ; le 5 mai 1942  : Giraudon, fusillé au Mont-Valérien…
Venant d’Aincourt où nous étions isolés dans une forêt, l’arrivée à Rouillé nous a rapprochés de l’humain. À Aincourt, nous avions une organisation clandestine du Parti communiste. Très vite, elle se restructura et participera au développement d’activités diverses, nécessaires au moral mais aussi au développement intellectuel de chacun.
À Rouillé nous sommes accueillis par la population venue nous témoigner sa sympathie, de la gare au camp. Vous savez, pour un résistant, pour un prisonnier interné, cela marque. Ce soutien ne s’est jamais arrêté y compris par les cheminots qui ouvraient le sifflet des locomotives chaque fois qu’ils passaient devant le camp. Pour nous, cela signifiait que des liens étaient possibles avec l’extérieur.
Au fil des semaines s’ouvrent des cours de littérature, de philosophie, d’allemand. Des groupes de théâtre se créent, des compétitions sportives voient le jour. La solidarité est pour nous essentielle. Elle est une règle de vie dans le camp des internés politiques.
Parler du camp, c’est aussi parler du docteur Cheminée, de Sœur Cherer, de Camille Lombard qui étaient les contacts directs avec nous. Des habitants nous procuraient de la nourriture, des renseignements. Les évasions des politiques étaient aidées par leur biais puis mises en liaison avec la résistance locale. J’apprendrai à mon retour de déportation, le drame de la forêt de Saint-Sauvant et le massacre de Vaugeton.
Oui, si la France se libère, c’est grâce à la coalition des Alliés, c’est indéniable et il est normal que l’on commémore le Débarquement et honore les soldats morts pour libérer notre pays. Mais il ne faut pas oublier que la résistance intérieure et extérieure, unie, prendra une part décisive, directe, à cette libération.
Que de chemin parcouru par cette Résistance (au départ  : de petites lumières !) qui essayait de redonner espoir au peuple de France. Pendant quatre années, cette Résistance a connu une terrible répression. Les exécutions de Châteaubriant, de Nantes, du Mont-Valérien, de Souge (d’internés et d’otages) avaient montré le vrai visage de l’occupant nazi et de la collaboration.
Nombreux sont les internés, fusillés, déportés qui n’ont pas connu la Libération à laquelle ils ont contribué. Nous ne pouvons les oublier et les internés de Rouillé étaient de ceux-là. (…) La Résistance avait souhaité que la France se reconstruise sur de bases nouvelles. Le Conseil national de la Résistance élabora un programme qui servit à bâtir cette République nouvelle. Son contenu ouvrit des avancées de formidables progrès de société.
Quelle injure à la Résistance, à toutes celles et tous ceux qui ont donné leur vie, de vouloir réduire ou anéantir ces avancées comme la Sécurité Sociale, le système des retraites, les services publics. Ces avancées sont partie intégrante des Droits de l’Homme et du Citoyen. Elles sont des références pour d’autres peuples du monde qui souhaitent l’égalité, la fraternité, la justice sociale, la liberté.
Au nom de qui, de quoi, devrions-nous aujourd’hui accepter une dictature économique qui asservit et appauvrit les peuples  ?
Pour moi, pour nous, au nom des Résistants, des Internés, des Déportés, des Fusillés, se libérer est de nouveau posé aujourd’hui. »
Fernand Devaux, Matricule 45472


Libération de Rouillé, Massacre de Vaugeton – juin 2013

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Froidure, vents et pluies sur le département de la Vienne mais aussi fidélité des autorités civiles et militaires, de la population et des associations soucieuses d’entretenir le souvenir de celles et ceux qui choisirent de s’opposer à la barbarie nazie au cours de la seconde guerre mondiale. Traditionnellement réparties sur les deux jours d’une fin de semaine, les cérémonies de Lusignan (2600 habitants), de Rouillé (2500) et de Vaugeton, commune de Celle-Levescault (1300), ont rappelé les souvenirs d’une Résistante exemplaire, d’un camp d’internement et d’un massacre en forêt et rase campagne.
Religieuse mosellane réfugiée en Poitou, sœur Jeanne Cherer exerçait les fonctions d’assistante sociale et vint en aide aux internés politiques de Rouillé (nourriture –vêtements – courriers). La maison de Lusignan où elle vécut, porte une plaque honorant sa mémoire. Devant l’école construite sur l’emplacement du camp d’internement de Rouillé, quelques six kilomètres plus loin, une stèle rend hommage aux internés du « centre de séjour surveillé » (ouvert pour 150 détenus en septembre 1941, il en comptait 638 en novembre 1942). En ces lieux, dans le recueillement public, Joël Busson, vice président de l’Amicale Châteaubriant-Voves-Rouillé-Aincourt et président du Comité du Souvenir de LoireAtlantique, a illustré par ses propos l’importance des commémorations et l’absolue nécessité d’enseigner l’Histoire aux jeunes générations.
A Vaugeton, le massacre du 27 juin 1944 fut évoqué par Patrick Bouffard, maire de Cellel’Evescault, qui a rappelé : « La libération du camp de Rouillé eut lieu dans la nuit du 10 au 11 juin.
Un maquis s’est constitué avec les prisonniers libérés et les résistants de la région, sous le commandement de Marcel Papineau, alias commandant Bernard et de Urbistando, alias Tromas… leur quartier général était à la Branlerie, en forêt de Saint-Sauvant. Disposant de peu d’armes, ils attendaient un parachutage remis de jour en jour et devaient quitter la forêt le 27 juin au matin. Trop tard : soldats de la Wehrmacht et miliciens français encerclent les lieux. Combat très dur, inégal… Malgré leur courage, des Résistants sont tués, d’autres sont capturés et sauvagement massacrés.. Le parachutage d’armes est arrivé le soir du massacre.
« Pour éviter la fosse commune à ces martyrs, les maires de Cellel’Evescault, Lusignan et SaintSauvant ont réparti les corps dans les trois cimetières afin de leur assurer une sépulture sommaire mais digne. Ils étaient Espagnols, Italiens, Belge, Arménien, Français… Ils ont perdu la vie en défendant les valeurs républicaines de Liberté, d’Egalité et de Fraternité…»
De son côté, Jean-Jacques Guérin, adjoint au maire de Poitiers, viceprésident de « Grand-Poitiers » a terminé son allocution en soulignant qu’il nous faut « puiser dans les pages d’Histoire et, dans le sacrifice de tant de Fusillés, d’Internés, de Déportés, ici et ailleurs, les leçons nécessaires à la compréhension du moment présent : analyser la montée du fascisme et du nazisme dans les années 30, n’est-ce pas mieux comprendre la montée et la banalisation, aujourd’hui, des populismes xénophobes et nationalistes ?
« Expliquer le contenu et la mise en œuvre du Programme du Conseil national de la Résistance pour reconstruire un pays dévasté, en associant progrès économique et progrès social, n’est-ce pas faire comprendre, aujourd’hui dans un monde en crise, pourquoi de nouvelles avancées sociales donneront de meilleurs résultats que le carcan de l’austérité ?
« Que le destin des 31 de Vaugeton contribue, aujourd’hui comme hier, à construire l’Humanité de demain pour, tout simplement, …continuer la vie. »
Jacques Carcedo


Rouillé-Vaugeton (Vienne), 24 juin 2012

De septembre 1941 à juin 1944, à Rouillé s’est élevé un camp d’internement réservé essentiellement aux patriotes opposés au régime de Vichy et à l’occupation allemande. Quelques kilomètres plus loin, vers la proche forêt de Saint-Sauvant qui abritait des maquis, 31 Résistants furent massacrés à Vaugeton, commune de Celle-l’Evescault. Chaque année, hommage leur est rendu successivement le même jour, en chacun de ces deux lieux. Pour le 68ème anniversaire de la libération du camp et du massacre, les cérémonies ont été l’occasion, pour Jean Amand (FNDIRP de la Vienne) de rappeler les causes et conséquences du nazisme et de retracer le massacre de Vaugeton :
« Ils étaient 31, dont 28 récemment libérés du camp de Rouillé à la veille de leur départ vers un camp de concentration. Ces 28 Résistants qui comptaient parmi eux de nombreux combattants de l’armée républicaine espagnole, se sont mis aussitôt à la disposition de la Résistance… Le 27 juin 1944, une division S.S. partie rejoindre le front de Normandie encercle la forêt de Saint-Sauvant. Un combat inégal s’engage entre les nazis et les maquisards. Marcel Papineau, alias capitaine Bernard, chef du maquis y trouve la mort. Les autres sont pris et assassinés sur place sous les yeux de quelques prisonniers que les bourreaux obligent à assister au massacre, avant de les conduire à la prison de Poitiers puis, de les transférer à Compiègne…et Buchenwald. Deux en mourront, quatre survivront à l’épreuve concentrationnaire. Ainsi, la tragédie de Vaugeton s’est-elle inscrite dans la longue liste des crimes perpétrés par les nazis dans notre pays. »