LE GROUPE GALLAIS DE FOUGÈRES RÉSISTE DÈS 1940
Décédée le 18 Janvier 2016, Huguette Gallais restait non seulement le dernier témoin de l’occupation, des premières heures de la Résistance, de la Déportation, mais aussi de la tragédie du groupe de résistants de Fougères. René Gallais, son père, dit de la “Touche Ferrond “ porte le nom du hameau dans lequel il est né en 1892 à Pleugueneuc. Après une enfance partagée entre Pleugueneuc et Combourg, il s’engage dans la marine en 1907. Breveté canonnier en 1911, il part effectuer son service militaire en Nouvelle Calédonie en 1913. Avant l’embarquement à Marseille, il rencontre au cours d’un accident de tramway, celle qui deviendra son épouse, Andrée Chardin, née dans les Vosges en 1898. Elle se dirige aussi vers la Calédonie, accompagnée de sa mère et de ses 2 jeunes sœurs afin d’y rejoindre le chef de famille. La guerre de 14-18 rappelle René en France. Après avoir combattu sur les bateaux de guerre, il poursuit la lutte sur les canonnières fluviales. Andrée devient alors sa marraine de guerre et durant tout le conflit, leur échange de courrier se fera sur un fond d’espoir, de volonté, de sacrifice pour le relèvement et la victoire de la France. Démobilisé en 1919, il regagne la Calédonie pour y épouser Andrée en 1920. Et c’est en 1921 qu’Huguette verra le jour à Nouméa. Pour des raisons de santé, ils reviendront en Métropole en 1925. En 1926, la famille s’agrandit avec la naissance de Gérald à Boulogne sur Seine. Il s’installeront successivement à Villeneuve-Saint-Georges, Chatillon-sur-Indre, Angers et Pontorson jusqu’à la nomination de René en tant que guide et gardien du château de Fougères en 1931 .En 1938 ,les accords de Munich l’inquiètent. Il est effaré de voir le retour des Allemands en 1940 et sait très bien que négocier avec l’allemand vainqueur sera un leurre. Cité plusieurs fois pour son courage en 14-18, René Gallais ne supporte pas de voir la France retombée sous le joug allemand.
RESISTANTS EN 1940, ARRÊTÉS EN 1941
Aussitôt l’occupation, il pense à stocker les armes des prisonniers démobilisés dans la tour du Hallay du château. L’appel du général de Gaulle le conforte à les protéger en campagne avec de la main d’oeuvre aussi résolue, d’où sortira ce groupe de résistants rattaché au réseau national “ «Ceux de la Libération» par l’intermédiaire du capitaine Albert Chodet. Toute sa famille, son épouse Andrée, sous le pseudo “JA “,sa fille Huguette, sous le pseudo de “Juanita”, étudiante à l’école d’infirmières de la Cochardière à Rennes, et même son jeune fils Gerald, âgé de 14 ans, participent activement aux actions du groupe comme les caches d’armes, les plans des terrains d’aviation pour les alliés, les caches des prisonniers evadés, les passages en zone Libre de courrier et les renseignements avec Londres et Paris sur les positions des troupes.
Hélas, suite à une dénonciation par un jeune couple, autonomiste breton, au service de l’Allemagne, mais infiltré dans le groupe comme agent anglais, une cinquantaine de personnes, dont la famille Gallais sont arrêtés le 9 octobre 1941 dans le cadre de l’opération Porto. Conduits à la Kommandantür (Hôtel des voyageurs), le jeune Gerald sera libèré aussitôt et les autres seront transférés à la prison d’Angers, où un bon nombre fut relâché le 27 octobre. Quatorze d’entre eux sont dirigés vers le 16 novembre dans les prisons de la Santé pour les femmes et à Fresnes pour les hommes. Le 18 décembre sera le départ pour la prison d’Augsbourg en Allemagne. Les interrogatoires sont particulièrement « musclés » pour Huguette frappée par la Gestapo pour faire parler les autres. Les mises en cachot, le maintien à l’isolement et au secret vont se succéder pour tous jusqu’au procès par le tribunal du peuple allemand le 23 février 1943 à Augsburg. Hormis, le jeune Joseph Brindeau, décédé de tuberculose à la prison et Théophile Jagu, relâché, faute de preuves, tous seront condamnés à mort et considérés “NN”.
GUILLOTINÉS EN ALLEMAGNE EN 1943
Ils sont transférés début septembre 1943 à la prison de Stadelheim à Münich pour les préparatifs des exécutions. Le 9 Septembre 1943, René Gallais et 7 de ses compagnons sont guillotinés tandis que Marcel Lebastard, Louise Pitois, Andrée et Huguette Gallais voient leurs peines commuées pour les camps d’extermination. Seuls Marcel Lebastard, Andrée et Huguette Gallais rentreront de ce calvaire. Andrée et Huguette, libérées du camp de Mauthausen par la Croix Rouge, sont de retour à Fougères le 1er Mai 1945. Elles pèsent chacune 30 Kg. Contre vents et marées, faisant face à tous les obstacles avec leur volonté et résistance inégalables, elles mettront dix ans à se reconstruire à la force des poignets. À leur retour, Andrée Gallais témoigne de leur passé partout où elle peut ainsi que dans la famille, tout en assurant les reprises des visites du château. Huguette s’occupe du magasin d’entrée. Mais Huguette reste fragile des poumons et la vie dans la baraque en bois, construite par la ville dans l’attente de la reconstruction de la maison du gardien, la rend à nouveau vulnérable. Elle doit effectuer un changement d’air dans les Pyrénées. C’est dans cette baraque que naîssent les 2 filles d’Huguette. Il leur faudra attendre 1955 pour réintégrer la maison
Solène ROFFE GALLAIS