Le 1er novembre 1943, à l’âge de 42 ans, une femme courageuse, engagée dans la Résistante dès les premiers jours, est guillotinée à Hambourg : Suzanne Masson.
Née le 10 juillet 1901, à Doullens dans la Somme, elle s’installe en région parisienne avec sa mère et sa grand-mère ; bonne élève, elle obtient un diplôme en dessin industriel.
Après plusieurs emplois, elle entre à l’usine Rateau de la Courneuve, en 1924. Elle est la seule femme à occuper un tel poste, traditionnellement réservé aux cadres masculins. Responsable syndicale CGT dans l’entreprise, elle est destituée de sa fonction de technicienne et reléguée aux archives avant d’être licenciée, courant 1938. Il lui est difficile de retrouver un emploi.
Elle est engagée comme formatrice au centre « Bernard Jugault », école de rééducation et de perfectionnement professionnel créée par le syndicat de la Métallurgie à la suite des acquis de 1936.
1939 : elle entre dans l’illégalité puis, en 1940, dans la clandestinité.
Le 5 février 1942, elle est arrêtée par la police française liée au gouvernement de Vichy. Écrouée à la prison de la Petite Roquette, elle est livrée à la Gestapo. Transférée à la prison de La Santé, tourmentée, mise au secret, sa santé se dégrade. En juin, elle est envoyée en Allemagne, dans un convoi qui va errer durant un mois. L’une des onze femmes de cet éprouvant voyage évoquera le souvenir qu’elle a conservé de Suzanne Masson : « … grande, svelte, les yeux bleus et profonds … et belle d’une beauté toute intérieure. Moralement, Suzanne rayonnait sur les autres prisonnières qui, même de convictions différentes, l’admiraient. Elle était admirable de fermeté, de clairvoyance et d’intelligence et elle communiquait sa force aux êtres qui l’entouraient. »
Le 13 juin, elle arrive à Lübeck. Elle déclarera devant ses accusateurs : « Je saisis avec plaisir l’occasion qui m’est donnée de déclarer, encore une fois, qu’à mon avis je n’ai fait que mon devoir de française, vis-à-vis de ma patrie, et de communiste, vis-à-vis de l’humanité. J’ai toujours agit sans aucune haine pour le peuple allemand que j’estime à sa juste valeur ». Elle se sait condamnée.
Le 28 octobre 1943 elle est transférée à Hambourg. Le lundi 1er novembre à 18h, Suzanne Masson meurt guillotinée.
Le gouvernement de la République française l’honorera avec cette citation : « Ardente patriote et grande syndicaliste, animée du plus admirable esprit de Résistance, a su communiquer à ses compagnons de lutte et de captivité son inébranlable foi en la victoire finale ».
Un centre de rééducation professionnelle parisien, appartenant au Syndicat CGT de la Métallurgie Ile-de-France, porte le nom de « Suzanne Masson ».
Michèle Gautier